Les biais cognitifs qui freinent le tourisme durable

11/12/2025
Voyager rime souvent avec rêve et découverte… mais nos cerveaux nous jouent des tours. Même en voulant être responsables, on gaspille l’eau, laisse la clim allumée ou choisit l’hôtel classique. Les biais cognitifs prennent le dessus, et nos bonnes intentions s’évaporent en un instant.

Comprendre les biais cognitifs, ces freins invisibles.

Les biais cognitifs sont des raccourcis mentaux qui nous aident à décider vite, mais qui peuvent aussi nous éloigner de nos intentions, même les plus sincères.

Imaginez un touriste arrivant dans une ville étrangère. Il doit choisir son hôtel, son transport, ses activités, parfois en quelques minutes. Le cerveau est submergé. Il va chercher ce qui est simple, ce qui lui est familier. C’est exactement le rôle des biais cognitifs.

Trois d’entre eux sont particulièrement puissants dans le tourisme :

  • Le biais du statu quo : nous préférons ce qui est connu.

Exemple : un hôtel qui change tous les jours les draps ou laisse la climatisation allumée, simplement parce que “c’est toujours fait comme ça”.

  • Le biais d’optimisme : nous pensons que les conséquences négatives nous affectent moins que les autres.

Exemple : “Ma douche longue ne changera pas grand-chose” ou “Je ferai attention la prochaine fois”.

  • La distance psychologique : nous accordons moins d’importance aux impacts éloignés dans le temps ou l’espace.

Exemple : un touriste peut ignorer que sa consommation d’eau dans un hôtel contribue à la raréfaction des ressources locales.

Même les voyageurs les plus conscients peuvent se retrouver à agir contre leurs valeurs à cause de ces mécanismes invisibles.

Comment ces biais influencent les décisions des acteurs du tourisme.

Ces biais ne concernent pas seulement les touristes. Chaque acteur du secteur est touché.

  • Les voyageurs : hors de leurs repères habituels, ils cèdent au confort et à la simplicité. Choisir un hôtel classique plutôt qu’un hôtel éco-certifié devient plus facile que de respecter leurs intentions durables. Une étude menée en Croatie (BIASTOUR) a montré que les décisions touristiques suboptimales s’expliquent souvent par ces biais cognitifs.
  • Les hôteliers et restaurateurs : le statu quo maintient des pratiques anciennes, le biais d’optimisme fait croire que “les clients ne s’y intéressent pas”, et la distance psychologique réduit la perception de l’impact écologique. Pourtant, de simples interventions, comme des nudges pour proposer des plats végétariens ou encourager la réutilisation des serviettes ont montré qu’il est possible de modifier les comportements clients et employés.
  • Les institutions et collectivités : elles planifient sur le long terme, mais le bénéfice environnemental étant perçu comme lointain, l’action tarde souvent. Comprendre les biais permet de concevoir des politiques et infrastructures qui facilitent la durabilité dès la conception : signalétique, aménagements écoresponsables, tarifs incitatifs pour les comportements durables.

Transformer les biais en leviers pour un tourisme durable

Comprendre ces mécanismes change tout. Le défi n’est plus seulement de sensibiliser, mais de faciliter l’action.

Pour rendre les comportements durables naturels et motivants :

  • Proposer des choix par défaut : par exemple, dans un hôtel, le linge peut être changé uniquement sur demande plutôt que tous les jours.
  • Rendre visibles les bénéfices immédiats : “Réduire votre douche de 5 minutes économise 45 litres d’eau, soit la consommation quotidienne de deux personnes locales.”
  • Associer plaisir et durabilité : créer une expérience où chaque geste écologique est gratifiant, plutôt que contraignant. C’est ce qu’on appelle l’écologie positive.

En mobilisant ces biais plutôt qu’en les combattant, les touristes, professionnels et institutions peuvent passer de l’intention à l’action. Chaque voyage devient alors enrichissant, responsable et inspirant.

Conclusion

Le constat est clair ! Nos bonnes intentions ne suffisent pas. Mais en comprenant les biais cognitifs et en concevant des expériences qui les prennent en compte, il est possible de rendre le tourisme réellement durable, ludique et gratifiant pour tous.