Pourquoi notre cerveau sabote nos bonnes intentions en vacances ?

24/10/2025
Vous avez déjà promis de voyager plus “vert”… avant de cliquer sur un vol low-cost ou de laisser la clim tourner toute la journée à l’hôtel ? Ne vous en voulez pas trop, ce n’est pas un manque de volonté. C’est aussi, et surtout votre cerveau.

Le mythe du touriste rationnel

On aime croire qu’on choisit nos voyages de manière raisonnée en comparant les prix, lisant les avis, faisant “le bon choix”.

Mais la science dit autre chose.

Les psychologues Daniel Kahneman et Amos Tversky ont démontré que nous décidons avant tout avec nos émotions et nos habitudes, pas avec des tableurs Excel dans la tête.

En voyage, plusieurs forces se combinent :

  • Une surcharge d’informations (des milliers d’offres, de photos, de prix à comparer).
  • La pression du temps (“vite, l’offre expire dans 2 heures !”).
  • La recherche de plaisir immédiat, bien plus forte que la promesse d’un impact futur positif.

Bref, notre cerveau fait ce qu’il sait faire, il choisit ce qui semble le plus simple, le plus agréable et le plus familier mais pas forcément le plus durable.

Les biais cognitifs : quand notre cerveau nous joue des tours

Les biais cognitifs, ce sont nos petites illusions mentales. Ils nous font gagner du temps, mais nous éloignent souvent de nos objectifs.

Quelques exemples concrets :

  • Biais du statu quo : on préfère ne rien changer. Si l’hôtel change les serviettes chaque jour, on laisse faire parce que “c’est comme ça”.
  • Biais d’optimisme : “ce n’est pas si grave si je le fais juste cette fois”. On se rassure, on minimise.
  • Distance psychologique : le réchauffement climatique paraît loin, abstrait. Difficile de relier notre douche d’hôtel à un problème global.
  • Biais d’ancrage : la première offre qu’on voit fixe notre référence avec un vol pas cher, une piscine géante et tout le reste paraît moins attractif.

En vacances, ces biais sont amplifiés, on sort de notre routine, on veut “profiter”, et notre cerveau adore se donner des excuses.

Pourquoi nos bonnes intentions s’effritent

Même les voyageurs les plus conscients ressentent ce décalage entre ce qu’ils aimeraient faire et ce qu’ils font vraiment car :

Le plaisir immédiat gagne toujours

L’excursion en jet ski ou le buffet à volonté, c’est maintenant, ici, concret. L’impact environnemental, lui, semble lointain.

Le cerveau aime la facilité

Rechercher un hôtel durable ou comparer des empreintes carbone, c’est fatigant. En voyage, on veut lâcher prise, pas faire des calculs.

“Mon geste ne changera rien”

Beaucoup de voyageurs se sentent impuissants : “à quoi bon si les autres ne font pas pareil ?”. Cette impression d’être une goutte d’eau décourage l’action.

Le contexte n’aide pas

L’hôtel all-inclusive, la clim, les serviettes fraîches tous les jours… Tout est conçu pour nous faire oublier les efforts. Et notre cerveau adore ça.

En clair, la volonté ne suffit pas. Pour agir vraiment, il faut aussi un cadre qui facilite le bon choix, sans qu’on ait à y penser.

Comment reprendre la main (sans se priver du plaisir de voyager)

Bonne nouvelle : on peut “hacker” son cerveau pour l’aider à être plus cohérent avec ses valeurs.

L’idée, ce n’est pas de culpabiliser, mais de rendre le comportement durable plus évident, plus simple et plus gratifiant.

Pour les pros du tourisme

  • Rendre l’écologie visible : un compteur d’eau, un affichage “vous avez économisé 25 litres aujourd’hui”. On se sent acteur.
  • Faciliter le bon choix : mettre le mode “éco” ou le plat végétarien par défaut.
  • Raconter des histoires : “Grâce à votre séjour, 10 personnes vont pouvoir avoir accès à l’eau" Le storytelling active l’émotion, pas la contrainte.
  • Simplifier : deux ou trois options durables claires valent mieux que dix promesses floues.
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Pour les voyageurs

  • Préparez un mini-plan éco avant de partir : par exemple, privilégiez les transports locaux comme le bus ou louez un vélo plutôt qu’un taxi. Réduire la climatisation dans la chambre et ouvrir les fenêtres quand c’est possible ou encore choisir des repas locaux plutôt que des plats importés ou industriels. Ces gestes, simples à mettre en œuvre, ont un impact réel.
  • Rendre son impact concret : sélectionnez un hôtel qui communique clairement sur ses efforts environnementaux comme le tri des déchets, l'utilisation d’énergies renouvelables, linge réutilisé sur demande ou suivez votre empreinte carbone avec une application dédiée. Vous verrez ainsi l’effet de vos choix se matérialiser, ce qui motive à continuer.
  • Changez une habitude à la fois : changez une habitude à la fois. Même un petit geste répété à chaque voyage comme l'utilisation d'une gourde réutilisable pour éviter les bouteilles en plastique contribue à construire votre routine de “voyageur conscient”.
  • Optimisez vos trajets : regroupez vos visites pour éviter les déplacements inutiles. Planifier vos trajets à l’avance réduit non seulement votre empreinte carbone, mais aussi le stress du voyage.

Et surtout, célébrez vos actions ! Partagez vos gestes éco, en parlez autour de vous, et assumez-les fièrement. Voyager éco ne signifie pas se priver, mais choisir différemment pour vivre mieux, pleinement, et durablement, même en vacances.

La durabilité ne commence pas par une brochure verte. Elle commence dans la tête, dans nos automatismes, nos envies, nos micro-décisions.

Le vrai défi du tourisme durable c’est le comportement humain.

Et ça, c’est une bonne nouvelle car comprendre notre cerveau, c’est apprendre à mieux l’apprivoiser.